'> Fabebook: avril 2014

dimanche 27 avril 2014

1980 - David Peace - Quartet du Yorkshire 3

Éditeur : Rivages (6 avril 2006) Collection : Rivages/Noir Poche: 522 pages


Après 1974 et 1977, David Peace poursuit sa chronique de l'ouest du Yorkshire, où les gens vivent dans la peur. Plusieurs années ont passé et l'éventreur continue à sévir malgré tous les efforts de la police.
Les femmes n'osent plus sortir le soir. La psychose monte, chacun soupçonne son voisin et le mal semble même avoir gangrené les forces de l'ordre.
Y a-t-il un flic honnête dans le comté du Yorkshire ?
Il y a Peter Hunter, seul contre tous. L'homme qui va enquêter sur les enquêteurs. Creuser à mains nues et ramener la boue. Creuser la tombe de ses collègues corrompus ou la sienne ? À travers le personnage de Peter Hunter, directeur adjoint de la police de Manchester, David Peace brosse dans une langue incantatoire le tableau palpitant, écorché et violent, d'un lieu et d'une époque confrontés au chaos.



Mon avis :
J'ai abordé ce troisième volet avec dans l'idée de continuer encore dans ce flou, cet étrange et prenante écriture hachée, meurtrie et pleine de fantômes dans la tête du ou des narrateurs.
Et bien ici l'écriture, l'histoire ... est racontée de façon un peu plus "classique".
Si on peut dire de Peace, écriture classique ... ce dont je doute.
Il existe dans 1980 une chronologie des faits plus aboutie.

Peter Hunter, Directeur Adjoint de la police de Manchester reçoit pour mission de redémarrer toute l'enquête sur l'éventreur du Yorkshire. On lui octroie une équipe, on lui donne accès aux dossiers d'enquêtes des différents départements et commence alors des retours aux premiers meurtres et toutes les difficultés rencontrées au fil de cette enquête des enquêtes.
Si Hunter n'est pas aussi assailli de cauchemars éveillés que Jack Withehead (voir 1977) il n'est pas exempt de pensées noires, l'absence d'un enfant dans son couple, des cauchemars et insomnies à répétition font de lui un personnage moins noir, moins torturé que les narrateurs de 1974 et 1977. Mais Hunter est quelqu'un d'intègre.
"Saint con !"

"Ensorcelé, je meurs."
La rencontre entre Hunter et Jack Withehead couché et attaché sur un lit d'hôpital, est fort révélatrice d'un mystère entourant les angoisses fantomatiques de Jack dans l'opus 1977. Une révélation de Peace qui nous éclaire plus encore sur les protagonistes de l'affaire de l'éventreur et aussi sur le fameux exorciste ... (lire absolument dans l'ordre pour compréhension).

Hunter va aller au fond des choses, explorer toutes les pistes, tomber et retomber inlassablement sur les agissements des enquêteurs ...  pourriture comprise, ... surtout !
Et Hunter va morfler.
"Saint con !"

Une chronologie et des fils tirés un à un sur les meurtres commis par l'éventreur du Yorkshire sont déroulés avec doigté pour la compréhension du lecteur.
Mais pas que : il y est aussi question de la corruption de la police, de l'ambiance grise et terne du nord de l'Angleterre et de son climat politique de l'époque.


Et si comme moi vous avez une lacune ou que votre mémoire vous fait un peu défaut sur le sujet, allez voir les informations au sujet de l'éventreur,  Peter Sutcliff qui a fait trembler l'ouest du Yorkshire du 30 octobre 1975 au 17 novembre 1980. Ici par exemple : William Peter Sutcliff.

Comme les deux précédents, ce livre m'a énormément éblouie, subjuguée par son écriture et il me reste encore à lire le dernier opus, 1983.
Je ne manquerai évidemment pas de vous en parler bientôt.

Est-ce que je conseille ce livre aux acharnés de roman noir ?
Est-ce que la question se pose ?
Lisez ce quartet et venez nous dire ce que vous en pensez.

Suite au prochain épisode .... 1983
Fabe.

"La quitte pour une autre…
Yorkshire, putain de Yorkshire…
Yorkshire primitif, Yorkshire médiéval, Yorkshire industriel…
Trois âges, trois âges de ténèbres…
Âges des ténèbres locaux…
Décrépitude locale, décrépitude industrielle…
Meurtre local, meurtre industriel…
Enfer local, enfer industriel…
Enfers morts, âges morts…
Marécages morts, usines mortes…
Villes mortes…
Les corbeaux, la pluie, et leur Éventreur…
L’Éventreur du Yorkshire…
Ce putain d’Éventreur du Yorkshire."

samedi 19 avril 2014

Green river - Tim Willocks

Éditeur - Sonatine - Date de parution 01/04/2010 (410 pages)

Green River, pénitencier de sécurité maximale au Texas. Un véritable enfer dans lequel, entre tensions raciales et violences quotidiennes, vivent cinq cent âmes perdues. Un univers sans pitié où le silence n’existe pas, l’obscurité non plus. C’est là que Ray Klein, ancien médecin, purge sa peine, en travaillant à l’infirmerie. Alors que sa libération approche, une émeute éclate dans la prison. Au milieu du chaos et de l’anarchie, Ray, qui est tombé amoureux de Juliette Devlin, psychiatre judiciaire, va tout mettre en œuvre pour la sauver alors qu’elle est séquestrée avec ses patients dans l’infirmerie.

Avec ce huis clos impitoyable peuplé de figures effrayantes, depuis John Campbell Hobbes, directeur de prison jusqu’à Henry Abbott, meurtrier schizophrène, Tim Willocks nous offre un portrait terrifiant de la vie carcérale. Il nous donne surtout un thriller prodigieux, au rythme haletant et au suspens oppressant.



Mon avis :
Le personnage central de l'histoire est Klein, appelé "Doc" par les détenus comme par les gardiens. C'est un homme fort, un caractère en acier et c'est celui qui va se battre comme un lion dans l'enfer d'une sanglante émeute qui va complètement ravager le pénitencier de Green River.
C'est aussi l'histoire d'un panoptique carcéral. La prison en elle même est une forteresse conçue pour ne laisser passer aucun coin de ciel bleu.

Tous les personnages de ce roman ont des personnalités fortes, même les plus faibles. Que ce soit Claude, ou plutôt Claudine qui gère son "couple" avec  Agry. Wilson, un noir champion de boxe. Coley, infirmier depuis trente ans .. et encore d'autres personnages haut en couleur.

Devlin, femme libérée,  passionnée et secrètement amoureuse de Klein est psychiatre à Green River. Elle travaille sur un mémoire concernant le comportement des sidéens et de l'impact d'une mort certaine en milieu carcéral. Travail qu'elle accompli avec Klein et Coley. Deux fois par semaine elle passe les portes de Green River pour se rendre à l'infirmerie et y accomplir son travail.
Elle a une autre obsession,  celle de baiser à mort avec Klein. Une obsession tenue secrète jusqu'à ce jour ...



En fait, elle avait dit à Catrin, sa copine, qu’elle avait envie de lui sucer la bite et qu’il la baise par-derrière sur le pont d’un langoustier au milieu d’une tempête pendant qu’elle passerait un bras entre ses jambes pour lui caresser les couilles.


- La prison est dirigée par un grand malade mégalomane et psychotique,  le directeur Hobbes va pousser le bouchon aussi loin que possible pour provoquer l'émeute.
Dès le début du livre ça se sent, ça pue la provocation et le sadisme. Bref Hobbes est une belle ordure !

Willocks ne fait pas dans la dentelle,  tous les personnages ont une âme noire, des cinglés prêts à tout pour un quelconque avantage. Que se soit pour un peu de confort ou de sexe.
Ah ben, parlons sexe, Tim Willocks nous le fait fort. Ce livre est un très bon roman noir mais aussi une grosse queue à lui tout seul (pour rester dans le langage de l'auteur).
À ce sujet il ne nous épargne rien. Tous les détails que vous pouvez imaginer, et même plus, sont décrits avec beaucoup de "réalisme" ...
Le langage est vulgaire pour la grosse part des dialogues mais ce sont les situations et la personnalité de la population carcérale qui l'exigent.

Par contre, niveau psychologie, c'est pointu ! Willocks en tant que psychiatre de profession décortique avec brio la psychologie de chaque protagonistes, chacun son histoire, chacun ses défauts et qualités, chacun sa façon d'agir et de penser.

Terry devint encore plus pâle. Il voulut parler, n’y arriva pas, déglutit et essaya encore.
« Alors tu vas… Je veux dire c’est pas seulement une…
— C’est ça, Dennis, dit Agry. C’est la guerre. Tonnerre des armes. Tempête du désert. La blitzkrieg. Appelle ça comme tu veux, putain. On va démolir les négros et tous ceux qui se mettront en travers. »

Cette histoire traite aussi très fortement de haine raciale et est une excellente vision de l'univers carcéral américain. Mais pas que ... c'est un roman époustouflant ! d'une grande violence !
Du début à la fin !

Agry avait l’intention d’incendier la Vallée des coureurs de fond, de la raser, et de pisser sur les cendres des nègres.

Willocks m'a bel et bien embarquée dans cette histoire que j'ai beaucoup appréciée.  C'est son premier livre écrit avant Bad City blues.

Je vous conseille de le lire ? Ben oui ! Absolument !

Fabe

jeudi 10 avril 2014

Le reflet de la salamandre - Philippe Boizart

166 pages Éditions Ex-Aequo  (24 mai 2013) Thriller




Paris, 5ème arrondissement. Une jeune femme est retrouvée atrocement mutilée dans un terrain vague le long de l’autoroute. Les sévices qui lui ont été infligés n’augurent rien de bon quant à la folie des meurtriers. Pour Camille, dont la vie privée va se retrouver intimement liée à cette affaire, et Mathias, enquêteurs au 36, Quai des Orfèvres, c’est le début d’une course effrénée contre la mort qui va éprouver toutes leurs convictions. Tour à tour chasseurs ou gibiers, les deux officiers accompagnés de Sophie, leur amie médecin légiste, vont vivre une traque infernale et bouleversante.






Mon avis :

Entre deux lectures fortes, noires et franchement excellentes, un peu de lecture plus légère avec ce thriller m'était nécessaire.
(Et là je me rends compte que pour moi, la lecture d'un thriller, c'est léger ... oups)
Le reflet de la salamandre  est un thriller court et bien structuré. Le sujet n'est pas exceptionnel, maintes fois abordé,  mais l'écriture est fluide et va droit au but.

Camille Doussey, commandant au 36 quai des orfèvres est appelée sur les lieux d'un meurtre extrêmement violent. Elle est accompagnée par Mathias, son binôme et ami dans la vie.
Après avoir passé la nuit avec Alex, un beau gars rencontré la veille, Camille est au mieux de sa forme, mais est loin de se douter de ce qui l'attend sur l'enquête qui démarre avec la découverte du corps d'une jeune femme assassinée.

La victime a été rouée de coups, violée et tailladée un grand nombre de fois. Comme si cela ne suffisait pas, le tueur a emporté son scalp !

Sur les lieux du crime, rien, pas un indice, pas une trace, pas d'empreinte. Si ce n'est un briquet ; Un zippo avec comme dessin une salamandre et le chiffre 1.

Camille manque de défaillir, ce briquet elle l'a vu cette nuit, dans les mains d'Alex. Et ce briquet est assez exceptionnel pour ne pas être fabriqué en série. Cette même nuit elle s'en était fait la réflexion.

Le tueur, pour une raison que l'on découvre au fil de l'histoire continue son œuvre, des meurtres vont encore être découverts. Des femmes, dont le tueur emmène à chaque fois le scalp !
Et comme Camille et son équipe ne connaisse pas son identité,  ils l’appelleront, Cochise ! Et pourquoi pas ?

L'histoire se déroule vite, la chronologie des faits est bien respectée.  C'est un thriller qui se lit d'une traite avec plaisir.

Si la fin ne m'a pas étonnée ni éblouie j'ai beaucoup apprécié la lecture de ce livre !

Alors ... envie d'un moment de détente sans se casser la tête ?
Allez-y avec Le reflet de la salamandre !

Fabe

L'auteur :
Philippe Boizart est né en février 1973. Il est Ingénieur Territorial en voirie et espaces publics au sein de Lille Métropole Communauté Urbaine. Passionné de littérature et de poésie voici son premier thriller. Il partage son affection pour les livres avec celle qu’il cultive pour le 7ème Art depuis l’enfance.

vendredi 4 avril 2014

La Faux Soyeuse - Éric Maravélias

Date de parution : 31/03/2014 - Éditeur : Gallimard - Collection : Série Noire



"Je suis couvert de sang mais je suis bien. Rien à foutre.
Dans l'univers cotonneux et chaud de la défonce opiacée, le sang n'est rien. La mort n'est rien. Et moi-même je ne suis rien. Joies et chagrins se succèdent dans une espèce de brouillard confus, un ballet macabre, et rien ne subsiste de tout cela, sinon parfois, au détour du chemin, un sentiment de gâchis irréversible qui me prend à la gorge. Nos vies de parias sont comme de frêles esquifs privés de gouvernail. Sans plus personne à bord. Elles sont ballottées au creux de flots tourmentés, secouées par des vents inconnus et changeants qui les mènent à leur gré vers des côtes plus ou moins hospitalières, incapables que nous sommes de changer ne serait-ce que la moindre virgule au récit chaotique de nos existences." 







Mon avis :
Le roman noir français aurait-il un nouvel auteur qui casse la baraque ? Quand je dis "casser la baraque" je veux dire un auteur qui donne du neuf, un coup de fouet à un beau panier de niaiseries. Non, tous les auteurs de noirs français ne sont pas niais ! Mais bon ..
Seulement Éric Maravélias à défaut de fouet, se sert de sa plume acérée pour nous emmener au fond de l'enfer.

La Faux Soyeuse ... titre qui à mon humble avis n'aurait pu être mieux trouvé !

Franck surnommé Eckel par les jeunes de la cité est un jeune gars qui vit principalement dans la rue avec ses potes, pas meilleur ni plus mauvais qu'un autre il fréquente les mauvais endroits, se complaît dans les mauvais coups et fait l'apprentissage de cette vie de la rue, de la nuit et de toutes les fréquentations que cela implique.

Au départ de l'histoire deux choses m'interpellent ...
Un, c'est écrit à la première personne. Deux, le parler argot, parisien et langage typique des tox.
Tout est évidemment compréhensible, ce langage est le même dans tous les pays francophones, un tox reste un tox.
Mais je me demandais si cela allait tenir sur la longueur .... genre, pas trop lasser ou devenir lourd côté écriture.

Heureuse surprise ! non seulement cela tient la route mais en plus c'est nécessaire à la profondeur, à l'assimilation de l'ambiance et à ce que vit, pense et ressent Franck.

Je reviens vers Franck ; alors qu'il en est à découvrir et se faire sa place dans le milieu des voyous, l'époque change, l'héro débarque dans les quartiers, et beaucoup tombent dans son doux filet .
Comme vous l'aurez deviné Franck tombe à pieds joints dans cet enfer cotonneux et plonge de plus en plus bas.
Car si le shoot apporte plaisir, le revers de la médaille est très très douloureux.

Avant
Au milieu des années 70, il n’y avait rien ni personne pour nous mettre en garde. Pas d’exemples vivants de la déchéance pour nous inspirer de la crainte, si tant est que ça eût marché. Aucun reportage sur la défonce ou de prévention des risques. Nous étions non seulement d’une ignorance crasse sur le sujet, mais, en plus, une curiosité presque maladive pour tout ce qui pouvait modifier nos états de conscience nous tenait.

On dit : "plaisir et douleur couchent dans le même lit" ... mais dans la vie d'un tox cet adage doit se comprendre à l'extrême ... la plupart du temps jusqu'à une mort certaine, à petit feu ... ou pas !

Dans ce roman noir l'auteur nous raconte tout, nous explique tout. Avec une apparente facilité à nous faire vivre la vie de Franck on entre dans son quotidien, dans son enfer journalier, dans ses amours, dans sa haine aussi.
Les personnages secondaires sont tout aussi attachants ou voir pas du tout, que ce soit Rachid (un peu la bête noire de Franck), Momo le petit frère, Le Vieux que tous respectent, Antoine et les autres. Tous ces gars là sont super bien décrits par l'auteur, leurs rôles dans la vie de Franck, dans sa déchéance, dans ses actions. Tout est bien placé dans les dialogues aussi, on ressent pleinement l'ambiance et ses dangers.

Sur les amours de Franck je ne vous dirai rien sauf peut-être un nom : Carole ...
Je ne vais pas vous spoiler le bouquin non plus, ce n'est pas mon habitude.

Tout est écrit sur un rythme frénétique, on ne s'ennuie pas, on fonce. On suit Franck tout au long de son "périple" de junkie.
Je vous assure aussi une fin explosive, ça vous va là ?

Un livre qui ne m'a pas fait perdre mon temps, la vie est trop courte !
Et puis j'me suis pas fait rouler non plus !

Alors !!! Vous m'avez comprise ?
Amateur de roman noir, foncez l'acheter !
C'est un premier roman écrit par Éric Maravélias, envoyé en août et publié en mars !
Un auteur à tenir à l’œil !

La page facebook de La Faux Soyeuse ici

Comme musique d'ambiance je pourrais citer "les Doors", ou Angie des Stones (non pas dédié à une fille mais à l'héro) mais j'ai plutôt décidé de vous faire vous rappeler, réécouter ou découvrir ceci, parce que j'aime bien, parce que c'est de l'époque.
Bref, parce que j'en ai l'envie, tout simplement.
Fabe