'> Fabebook: 03/31/14

lundi 31 mars 2014

1977 - David Peace

Poche: 424 pages Editeur : Rivages (4 mars 2005) Collection : Rivages Noir

Quartet du Yorkshire 2

Si 1977 est l’année du jubilé de la reine d’Angleterre, c’est aussi celle de l’affolement pour tous ceux qui assimilent le sept au chiffre de l’apocalypse. Ils n’osent plus sortir de chez eux. Il y a dans la région de Leeds "un million de petites apocalypses et des tas de putains de comptes qui se règlent". Le plus inquiétant, celui qui terrorise tout le Yorkshire est connu sous le nom de L’Éventreur. En qniuelques années, il s’est rendu coupable d’une dizaine de meurtres de prostituées qu’il défigure au tournevis et au marteau. Au cœur de cet enfer, deux hommes sont particulièrement affectés : le policier Bob Fraser, trente-deux ans, qui hait le monde aussi fort qu’il se déteste lui-même. Marié avec Louise, la fille d’un vieux flic qui agonise à l’hôpital, il culpabilise car il délaisse son fils (qu’il adore) depuis qu’il est amoureux de Janice, une jeune prostituée dont il craint qu’elle ne soit victime de l’Éventreur. Le journaliste Jack Whitehead se trouve dans la même spirale de désespérance. Alcoolique obsédé par la disparition violente d’une certaine Carol, il fait des cauchemars tout éveillé et feuillette inlassablement le dossier Meurtres et agressions de femmes dans le nord de l’Angleterre. Et tandis que le tueur continue de frapper méthodiquement, les enquêtes s’enlisent et les deux protagonistes sombrent peu à peu dans la folie. Ce deuxième volet du Red Riding Quartet, une chronique sociale sur la région du Yorkshire, est encore plus éprouvant que 1974 qui ouvrait le feu. C’est la description d’un monde en deuil, accablé par les meurtres mais aussi par la crise économique. Certaines scènes qui mettent en cause le comportement de la police sont d’une dureté à la limite du soutenable pour les âmes sensibles. S’y ajoute une écriture hachée, pleine d’ellipses et de dialogues vifs qui pourra surprendre le lecteur ne connaissant pas encore ce romancier d’exception. --Claude Mesplède --Ce texte fait référence à l'édition Broché .

Mon avis :

Après avoir lu ce deuxième volet du quartet du Yorkshire je suis certaine que peu de romans noir arriveront à me captiver autant.
Dans ce deuxième opus, deux personnages centraux vont livrer leurs histoires, leurs emotions et leurs angoisses, on retrouve Jack Whitehead journaliste et "reporter de l'année" (lire 1974) et  Bob Fraser, un policier, lancé sur l'enquête de meurtres de prostituées.

L'histoire reprend le fait divers sordide des meurtres perpétrés par l'éventreur du Yorkshire à partir de  74. Mais David Peace ne nous relate pas les faits à la manière histori que ou spectaculaire des romans style "tourne-pages" ...
Il nous raconte le sordide que vivent les personnages, par les émotions profondes venues, entre autre, des tripes de Jack Whitehead et Bob Fraser.
Donc il ne faut pas s'attendre à de classiques révélations sur une enquête et blablabla ...  c'est un roman noir pur jus, 100%  d'angoisses et de délires fantomatiques.

Le mardi 20 novembre 1975, Clare avait eu des relations sexuelles avec trois hommes, dont un seul avait été identifié.
Et mis hors de cause.
Au matin du 21 novembre 1975, Clare était morte.
Éliminée.
Une botte dans la chatte, un manteau sur la tête.

L'auteur nous plonge plutôt dans l'âme des prostituées qui ont échappé ou pas à l'éventreur, il nous place de leur côté, de leurs angoisses et de leurs pauvres vies vendues pour quelque argent. Le sexe est violent, voir bestial mais l'écriture de Peace nous livre aussi la détresse de ces femmes et quelques moments de tendresse et d'espoir. Espoir, pour quelques lignes seulement ...

Ce livre ne se lit pas de façon "distraite" il faut s'accrocher pour comprendre, lire entre les lignes et pouvoir aussi faire une pause, faire quelques retours en arrière. Qu'il s'agisse des pensées de Bob Fraser, de ses vieux démons et surtout de son amour pour Janice. Ah Janice ! Que va-t-il lui arriver ? Janice que Fraser ne peut que désirer ... à chaque instant.
Et puis il y a Jack, qui enquête pour son journal lui aussi poursuivi par ses fantômes, Oh Carol ... lui aussi délirant au fil des pages, le jour la nuit à chaque instant ! Entre l'alcool et ses envies de sexe.

Là, dans la rue, je la serre dans mes bras, sang sur mes mains, sang sur son visage, sang sur mes lèvres, sang dans sa bouche, sang dans mes yeux, sang dans ses cheveux, sang dans mes larmes, sang dans les siennes.

L'écriture à la hache de David Peace est envoûtante, effrayante, angoissante et parfois peu compréhensible sauf si on s'y attarde suffisamment.

Je conseille fortement de lire ce quartet dans l'ordre, c'est une exigence pour la compréhension de "l'œuvre" de David Peace. Et à ceux et celles qui aiment le roman noir je peux vous dire qu'il ne faut pas passer à côté de David Peace et de son quartet du Yorkshire.

À très vite pour la suite, en l'occurrence "1980".
Fabe

Biographie de l'auteur
David Peace est avec Robin Cook le seul romancier britannique qui ose pousser au paroxysme le tableau de la gangrène morale qui ronge l’Angleterre des années 70. Comme dans 1974, on retrouve dans ce livre les personnages puissamment campés, les images choc, la rythmique hallucinatoire, mais aussi la vigueur du désespoir fondé sur la lucidité du constat. Les cauchemars de David Peace ne sont pas des élucubrations, ils sont l’expression d’une conscience terriblement aiguisée et d’une remarquable personnalité d’écrivain. --Ce texte fait référence à l'édition Broché .